Dépêchons-nous
de boire un petit coup !
Janvier, an 07. A Bouzeron,
en Bourgogne, nous prenons un verre avec
nos voisins, comme souvent. Lui est à la
retraite et fait faire sa vigne par un
vigneron de Nantoux, à quelques kilomètres
de là. Mais ce vigneron vient de faire
faillite. Que va devenir l’alligoté de mon
voisin ?
Son copain (dont l’accent bourguignon est
un patrimoine local à lui seul) passe tous
les jours, en fin d’après-midi. Mais lui
non plus n’est pas gai, ses affaires vont
mal. Pourtant il fait toutes sortes de
vins, dont un bon Rully 1er cru.
Le fils de mon voisin travaille à
Saint-Aubin, dans les vignes, pour un
petit patron. Mais le patron vient de
mourir. Le fils de mon voisin continue à
s’occuper de son pinot noir, c’est comme
pour les bêtes, on ne peut pas s’arrêter,
mais qui va racheter les vignes ?
La Bourgogne, pourtant, va mieux, elle a
augmenté ses ventes à l’export de 16%. Les
vins sont de mieux en mieux faits, les
vignerons font appel à des experts
œnologues et aussi à des commerciaux.
Mais tous ces petits domaines, qui n’y
arrivent pas, parce qu’ils ne sont pas
équipés comme il faudrait, risquent d’être
rachetés par des grands groupes, ou bien
abandonnés. On n’est pas nostalgiques,
mais on aimerait bien continuer à boire
des petits coups avec le vigneron du coin,
et à faire d’innombrables comparaisons
entre les vins des uns et les vins des
autres. Le côté accueillant, sans préjugés
(parce qu’un client se traite bien), la
mosaïque des terres, des petits villages,
des exploitations particulières, il faut
se dépêcher d’en profiter, en Bourgogne.
Elisabeth Motsch
Dernier livre paru : Ciels
changeants, menaces d’orages /
Vignerons en Bourgogne, Actes Sud sept
2005
L'oléoduc
serpente entre vodka et thé
s
Il est des écrivains qui
pensent et écrivent.
Il est des poètes qui écrivent et pensent.
Il est des vagabonds qui agissent et
écrivent.
Comme il est dommage que les programmes
scolaires ne soient pas équipés de
systèmes de mise à jour automatique. Cela
leur permettrait d’intégrer au fur et à
mesure des oeuvres qui sont à la fois
littéraires et contemporaines. Jean-Edern
Hallier, évoqué ci-dessous, était destiné
à rejoindre l’Académie Française. Quand
sera-t-il « étudié » ? A 23 ans, Florian
Zeller (évoqué dans notre numéro
http://www.pafmag.com/octobre_06.html) est
évidemment bien trop jeune ! Et le
trentenaire Sylvain Tesson, qui à chacun
de ses retours nous relate ses péripéties
haletantes avec un style littéraire dont
peu de Goncourt peuvent s’enorgueillir.
Donc pour le Ministère, le talent attend
la valeur des années…
Après son périple
haletant à travers la Sibérie (seul avec
une tente, sans la logistique – digne de
la Défense nationale – que TF1 a récemment
mise à l disposition d’un « aventurier »),
Sylvain Tesson a voulu en savoir plus sur
les vaisseaux contemporains des activités
humaine : les oléoducs. En l’occurrence,
ceux qui acheminent le gaz et le pétrole
de l’Azerbaïdjan.
Des tracés
historiques
D’emblée, il s’aperçoit
que les tracés des oléoducs suivent en
réalité des itinéraires historiques, et ce
pour des raisons faciles à comprendre :
l’homme a toujours recherché les passages
géographiques les plus accessibles (ce
n’est pas tout à fait vrai pour le
Caucase), et les détours qu’il s’est
imposés obéissent à des inimitiés
traditionnelles, ce dont tiennent encore
aujourd’hui compte les constructeurs.
C’est donc tout naturellement qu’il a
débarqué sur la Mer d’Aral pour rejoindre
la Méditerranée en longeant le BTC
(oléoduc Bakou-Tbilissi-Ceyhan),
essentiellement à dos de vélo.
Comme toujours dans ses récits, le
parcours est scandé de vodka et de
vin. C’est la première fois que nous
voyons un témoin digne de ce nom
raconter que le Géorgien moyen descend au
moins 6 bouteilles de vin par
repas, quelquefois le double, témoignage
que personne n’arrive à faire
passer en France (où le maximum toléré est
2 verres pour les femmes, 3
verres pour les hommes, voir
http://www.linternaute.com/sante/dependances/conseils/07/0701-reduire-alcool/1.shtml)
.
Evidemment, en observant que la Géorgie
est un nid de centenaires,
cela fait désordre dans la frénésie
anti-alcoolique ambiante…
Il observe en passant que les Russes
avaient réussi à dissoudre l’islam dans la
vodka (« Allah déteste l’alcool, il ferme
les yeux quand j’en bois ») et que les
pilotes ont à cet égard des approches
particulières de la sécurité…
L’auteur sépare nettement son périple en
deux étapes : l’étape européenne (la plus
orientale !) et l’étape islamo-asiatique.
En dehors de cette différence manifeste
(vodka contre thé, exhaustivement décrit
dans notre Guide Mondial de la Gueule de
Bois), Sylvain s’est amusé à concocter cet
intéressant tableau comparatif :
ASIE
|
EUROPE
|
chameaux
|
chevaux
|
station
accroupie
|
station debout
|
temps dépensé
|
temps compté
|
collectivisme
|
individualisme
|
sens du fort
|
sens du beau
|
jouissance de
l’instant
|
espoir en
l’avenir
|
maîtrise de
l’espace par le temps
|
maîtrise de
l’espace par la vitesse
|
indifférence au
bruit
|
amour du silence
|
Notre reporter exprime en
termes simples sa profession de foi : «
Les kilomètres abattus sont le plus grand
trésor que peut amasser un homme ». Mais
évidemment pas n’importe quels kilomètres.
La désertude
En particulier ceux
parcourus dans les déserts. Car la
désertude (non, ce n’est pas une
maladresse) procure des élans
d’inspiration quelquefois sublimes (relire
Antinéa). « La nostalgie est une paresse.
Elle autorise à ne pas traquer dans
l’époque les raisons de se réjouir ».
Exposé suivi d’une magnifique digression
que j’engage le lecteur à découvrir.
Digression s’éloigne bien sûr de la ligne
du titre : la symbolique de l’énergie.
Mais le parcours de l’oléoduc est sinueux,
lui aussi.
Au cœur du voyage,
l’écologie, mais aussi la politique : «
Les peuples de l’Islam tiennent l’Occident
dans un état de dépendance énergétique qui
ne s’appuie ni sur le génie propre, la
force militaire, l’habileté politique ou
le rayonnement culturel, mais sur les
hasards de la géologie. L’islamisme lave
toutes les vexations ».
Mais dans ce domaine, ce
qui revient plus souvent, c’est la mise en
disponibilité de la gente féminine dans
les terres d’Islam. Et de conclure : la
Turquie en Europe, niet !
Jean-Pierre Jumez
Sylvain Tesson – Eloge de
l’énergie vagabonde –
Editions des Equateurs – 18 euros en
France métropolitaine
L’avocat
de la vodka
Jean-Edern Hallier, encore.
On continue de polémiquer autour de celui
qui s’était senti trahi par François
Mitterrand puis par Jacques Chirac, qu’il
avait aidés à se faire élire sur le dos de
leurs prédécesseurs respectifs.
Fax à Chirac : « On ne peut
pas acheter la presse, puisqu’elle est
vendue ; confiez-moi la responsabilité
d’une information parallèle ».
Et après l’élection : «
Souvenez-vous de ce train que j’ai lancé
au tour de France pour vous soutenir à
l’époque où vous étiez le plus isolé ?
Maintenant que vous avez gagné, je ne veux
pas rester sur le quai ! ».
Mais on persiste à ignorer
celui qui offrit à la francitude l’une de
ses plus belles plumes.
Fax à un huissier qui venait
saisir les meubles de son château :
« Cette propriété est la demeure sacrée de
ma mémoire d’écrivain. Elle sera un jour
changée en musée… C’est au château de la
Boissière qu’à commencé la révolte du
timbre, celle des Bonnets rouges. Quand on
a voulu y porter atteinte, les percepteurs
et les trésoriers ont été pendus… Je ne
voudrais pas qu’une telle extrémité puisse
vous arriver. Pourtant, ni mes fantômes ni
moi-même ne plaisantons. »
Fax à Christine Ockrent,
alors patronne de l’Express : « Mon rêve,
c’est de faire un bloc-notes. Ça serait
tout de suite très supérieur – et j’avoue
que cela ne m’est pas très difficile – à
Bernard –Henri Lévy au Point. »
Fax à une rédactrice de
l’AFP : « Donc, je compte sur vous pour
qu’il n’y ait pas de black-out – puisque
je suspecterais aussitôt ce black-out de
venir de vous. Bien sûr, je sais que je me
fais un souci exagéré et que dès demain,
j’aurai à vous faire mes excuses pour ne
pas vous avoir fait confiance… Croyez
envers et contre toutes mes inquiétudes, à
l’amitié que je porte à la grande
professionnelle que vous êtes. »
Fax peut-être prémonitoire à un ami : «
J’ai entrepris une longue enquête autour
du personnage de Roland Dumas… Comme
Victor Hugo ou Chateaubriand, j’ai besoin
de la vie publique comme matrice de ma
prose ». C’est justement Roland Dumas que
le frère de feu Jean-Edern met en cause
dans la chute de bicyclette qui lui fut
fatale…
A. LEONCE-LABOIE
Jean--Edern Hallier : Fax
d'outre-tombe - Michalon
- 23 euros en Fance métropolitaine
(publicité)
ARE YOU READY FOR?
|
LACK
OF ALCOHOL MAY
BE HAZARDOUS TO
YOUR HEALTH
|
New
Yor-cœur : ivresse livresque
CharlElie Couture se
réclame du « multisme », reprenant ainsi
l’esprit du « Jeu des Perles de Verre »
(Hermann Hesse) : les arts s’épaulent pour
créer l’artiste. Rock, peinture, photo,
poésie… autant de facettes pour un même
parcours. Autrement dit, son public doit
faire l'effort d'appréhender l'éventail de
ses inspirations pour sortir enrichi de sa
fréquentation (recommandable). Les textes
appellent les images qui appellent la
musique C'est dire si la tâche est ardue
de ce côté de l'Atlantique. En revanche,
New York est la ville complice du créateur
qui n’y rencontre qu’une seule
discrimination : l’argent, c'est-à-dire,
dans la perspective étatsunienne, le
mérite. Il y trouve une liesse (et
peut-être une liasse !) qui ne se compare
qu’à l’ivresse ou aux délires chimiques.
Sally O'GOULLOW
CharlElie Couture – New
Yor-Cœur – Les
Presses Littéraires – 23 euros en
France métropolitaine
Avant
de se barrer, il écume les bars
Jeremiah Brown va quitter
les Etats-Unis pour revoir sa mère en
Ecosse. En une nuit précédant son départ,
il ressasse son destin d’immigré.
Utiliser les bars comme fil conducteur
d’un roman est évidemment un procédé
hautement recommandable. Nous avons relaté
dans ces pages de réels succès : La Conquête
de la Pologne de Paul Jimenes, Cinq
matins de trop de Kenneth Cook, Verre
Casséd’Alain Mabanckou ..
Mais ici, on n’y croit pas
vraiment, et on a du mal à lever le coude
pour tourner la page.
Justin PETIT-DERNIER
James Kelman - Faut être
prudent au pays de la liberté - Editions Métailié
- 23 euros en France métropolitaine
Bière
XO
A Cognac, la brasserie
des Gabariers produit une bière aromatisée
au cognac (XO
Beer). La production est passée de
500hl en 2005 à 1.600hl en 2006.
Bière
X Catho
Le pape ne
renie pas sa Bavière natale
"La
plupart des critiques ne payent pas
les additions !"
Que peut-on dire
d'inavouable sur les inspections des
critiques chez les grands chefs ? Y'a-t-il
des dessous de tables pour obtenir de
bonnes critiques par exemple ?
Selon Léo Fournaud,
ancien critique gastronomique à ELLE,
oui et non. La publicité est un bon moyen
de corruption. Le publicitaire du journal
ou du média passe dans le resto et promet
en échange du paiement d'une publicité un
bon papier. La publicité interdit aussi
qu'on parle d'une table si l'expérience
n'a pas été bonne ou alors il faut en
parler en termes élogieux. J'ai par
exemple parlé en bien d'un resto qui était
la propriété de LVMH (Bernard Arnault), le
premier annonceur de pub dans ELLE
(mode, parfum, etc.) alors que ce resto
n'en valait pas la peine. La direction du
journal m'avait donné des instructions
pour cela.
Il n'y a pas vraiment de
dessous de table dans le métier.
Seulement, le critique qui se fait traiter
comme un roi aura tendance à dire du bien
de la main qui l'a nourrie. C'est cela la
corruption et cela arrive souvent.
Lire l'article complet
sur l'Internaute
Kumi
Kumi, chang'aa : à éviter
Au Kenya, on assiste à une véritable
guerre des gangs pour le contrôle de la
chang'aa, le tord-boyaux local.
Cet alcool illégal est fabriqué en masse à
partir de farine de blé, de sangho, de
mais, fermentée dans de l'eau sucrée. Les
bouilleurs du cru y rajoutent du méthanol,
du formol, du liquide batterie... Résultat
: les consommateurs deviennet fous ou
aveugles. La distribution de la shanga est
assurée par la secte mondiki (créée dans
le années 80, drapeau rouge vert noir et
blanc, dont le but et est le retour aux
valeurs kikuyu) qui en a le monopole de
fait.. La secte est Interdite par
gouvernement et subit de nombreuses
descentes de police. Le pouvoir économique
de la secte est tel que les autorités
ferment les yeux sur le commerce de la
shanga. Mais les taliban (les musulmans)
cherchent à mettre la main sur ce juteux
commerce. D'où une sanglante guerre des
gangs.
Q. SECK